
Sarkozy déwò !
Date: 10 décembre 2005 à 15:03:39 CET Sujet: Martinique
Grâce à l'implication des peuples antillais et l'intervention providentielle d'Audrey Pulvar, le président de l'UMP et ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy s'est vu souhaiter, "de loin, la bienvenue en Martinique".
Comme le rappelle Max Dufrénot, dans le France-Antilles du 08/12/05, la disparition de la notion de peuple d'outremer, remplacée par celle de population d'outremer dans la constitution française avait à l'époque suscité un émoi similaire des élites antillaises qui avaient pourtant fini par "rentrer dans le rang", dès le premier calalou servi par la belle-mère patrie.
Dans cette affaire de "rôle positif" de la présence française outremer, c'est un quotidien français qui a mis la puce à l'oreille à nos hommes politiques, près de 9 mois après le vote de la loi, les obligeant à se réveiller de leur torpeur parlementaire pour dénoncer ce hold-up de la législation sur l'objectivité de l'histoire. Les socialistes français ayant échoué dans leur tentative d'amendement.
Mais cette fois, les anticolonialistes résolus, à force de gesticulations et de déclarations offusquées, ont obtenu l'intervention du chef de l'état Jacques Chirac suggérant la saisine d'une mission pluraliste pour l'étude et probablement la révision de la loi controversée.
Cela n'aurait certainement pas suffi sans les manifestations populaires en Martinique et en Guadeloupe, ni sans l'interview contradictoire de Nicolas Sarkozy par la journaliste Martiniquaise Audrey Pulvar sur Soir 3. Le président de l'UMP avait esquivé d'une pirouette la confrontation avec les Antillais, sans se douter que cette interview menée avec brio dans le style anglo-saxon le pousserait à commettre une bévue que seul désormais pourront rattraper ses alliés naturels de l'UMP et pourtant rivaux Jacques Chirac et Dominique de Villepin.
Comment le ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy s'est retrouvé persona non grata en Martinique, en bon émule de Jean-Marie le Pen, refoulé à l'extérieur 18 ans plus tôt :
Source AFP, Décembre 2005.
Manifestation à Fort-de-France
Près d'un millier de personnes ont manifesté mercredi en fin d'après-midi
dans les rues de Fort-de-France (Martinique) pour demander l'abrogation
d'une disposition de la loi sur les rapatriés relative au "rôle positif"
de la colonisation.
A l'appel du "collectif martiniquais pour l'abrogation de la loi de la
honte" et d'une trentaine d'organisations, les manifestants ont défilé en
lançant des slogans en français et en créole comme "à bas la loi de la
honte" ou encore "kolonisasyon pa bon".
Dans le cortège composé d'élus, parmi lesquels les députés de Martinique
Alfred Marie-Jeanne et Philippe Edmond-Mariette, le maire de
Fort-de-France Serge Letchimy, de syndicalistes, d'enseignants et de
lycéens notamment, on pouvait lire sur des banderoles "Colonisation =
crime contre l'humanité" ou "non à l'Histoire arrangée", entre autres
inscriptions.
"Il y a longtemps qu'on avait pas eu une telle manifestation à
Fort-de-France, a estimé Francis Carole, un des porte parole des
manifestants. Réagissant aux propos de Nicolas Sarkozy, mercredi soir, sur
France 3 sur la "repentance permanente qui touche aux confins du
ridicule", il a estimé qu'il s'agissait d'une "nouvelle provocation".
"Peu importe que nous soyons 100 ou 1000, a déclaré pour sa part le député
Philippe Edmond-Mariette, il était important de montrer à nos populations
que la conscience antillaise est éveillée et qu'il convient de faire
abroger la disposition controversée de la loi du 23 février 2005".
Enfin le maire Fort-de-France a qualifié la mobilisation de "digne et
respectueuse".
Sonjé 6 désanm 1987
Le président du Mouvement des démocrates et écologistes pour une
Martinique souveraine (Modémas), Garcin Malsa, a salué mercredi la
"capacité" des Martiniquais "à faire peuple", après la mobilisation qui a
entraîné l'annulation de la visite de Nicolas Sarkozy aux Antilles.
"En ce jour anniversaire du rejet du fasciste Le Pen, tirons comme
enseignement notre capacité à faire peuple, chaque fois qu'il s'agit de
faire reculer les racistes et les colonialistes", écrit-il dans un
communiqué.
Le président du Modémas conclut en créole: "Sonjé 6 désanm 1987: Le Pen
déwò! 6 désanm 2005: Sarkozy kayé!" (Souvenez-vous du 6 décembre 1987: Le
Pen dehors! 6 décembre 2005: Sarkozy se dégonfle!).
Le 6 décembre 1987, l'avion de Jean-Marie Le Pen n'avait pu atterrir sur
la piste du Lamentin, envahie par des manifestants qui s'opposaient à la
venue en Martinique du leader du Front national (FN).
La commune de Sainte-Anne (Martinique), dont Garcin Malsa est le maire et
conseiller général, figurait au programme de la visite en Martinique du
ministre de l'Intérieur.
Nicolas Sarkozy devait tenir une réunion sur le thème de l'aménagement du
territoire, jeudi sur le site du Club Med à Sainte-Anne.
Sarkozy annule son voyage aux Antilles
Nicolas Sarkozy a annulé son voyage en Martinique et en Guadeloupe
programmé de jeudi à samedi, a-t-il annoncé dans une interview à paraître
mercredi dans France Antilles, alors que se sont multipliées sur place les
protestations contre ce déplacement.
Le ministre de l'Intérieur et président de l'UMP devait arriver mercredi
en début de soirée en Martinique, y séjourner jeudi, puis enchaîner le
lendemain avec la Guadeloupe, sur le double thème de la lutte contre le
trafic de stupéfiants et contre l'immigration clandestine. Il devait tenir
une réunion politique dans chacune des deux départements d'Outre-mer.
"Les conditions de sérénité d'un travail collectif nécessaire pour traiter
efficacement des questions fondamentales pour les Antillais que sont la
sécurité, le développement économique et l'emploi ne me paraissent
pasaujourd'hui réunies", déclare le ministre de l'Intérieur et président
de l'UMP dans cette interview.
"J'ai par conséquence décidé de reporter mon voyage de quelques semaines,
ajoute-t-il.
"J'ai longuement préparé ce voyage qui revêt, à mes yeux, une importance
toute particulière compte tenu des enjeux en cause et des attentes des
Antillais dans les domaines de ma responsabilité", explique M. Sarkozy.
"Or, je constate que des polémiques, qui tiennent pour l'essentiel à des
malentendus liés à la loi du 4 février 2005, mais qui sont bien réelles,
suscitent une émotion particulière".
"Les visites du ministre de l'Intérieur sont rares. Je pense qu'il faut
qu'elles soient de vrais moments de dialogue et d'échange. En attendant,
je fais une proposition : celle de recevoir les élus des Antilles, toutes
tendances confondues, afin que nous puissions parler des motifs d'émotion
qui sont les leurs", ajoute-t-il.
Victorin Lurel, député et président PS de la Région Guadeloupe estime que
Nicolas Sarkozy a annulé une "tournée pré-électorale aux Antilles avec des
arrières-pensées exclusivement politiciennes".
Selon lui, "ce report de dernière minute illustre la singulière légèreté
du président de l'UMP qui avait organisé une tournée pré-électorale aux
Antilles avec des arrières pensées exclusivement politiciennes.
En Martinique, l'annulation du voyage aux Antilles de Nicolas Sarkosy a
été accueillie comme "une première victoire", a indiqué à l'AFP, Francis
Carole, chef de file du Palima et porte-parole d'une trentaine
d'organisations politiques, syndicales et associatives.
Plusieurs syndicats et partis politiques ont décidé de maintenir leur
mouvement de protestation en Guadeloupe malgré l'annulation de la visite
du ministre de l'Intérieur, prévue mercredi soir, a-t-on appris source
syndicale.
De nombreuses voix s'étaient élevées en Martinique contre la venue de M.
Sarkozy, notamment en raison de la loi de février 2005 sur les rapatriés
faisant étant d'un "rôle positif" de la colonisation française.
Figure éminente de la Martinique et des Antilles, l'écrivain et homme
politique Aimé Césaire avait annoncé qu'il ne recevrait pas le ministre et
président de l'UMP.
Un "collectif martiniquais pour l'abrogation de la loi de la honte"
s'était constitué mardi proclamant sa volonté de faire supprimer un texte
législatif qui à ses yeux "justifie les crimes commis au nom d'une
civilisation qui a conduit à l'extermination de peuples, à l'extinction de
cultures et au pillage de nombreux pays".
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